Élections – Le 1er tour des municipales 2020 : rétrospective

Commentaire :

A la suite du premier tour des élections municipales de 2020, le Cabinet GARTNER Avocats et Associés a eu l’occasion de défendre plusieurs listes sortantes.

Ces élections se sont tenues dans un contexte particulier. En effet, lors de son allocution du 12 mars 2020, le Président de la République après avoir annoncé la fermeture des crèches, établissements scolaires et universités à compter du lundi suivant les élections municipales, a indiqué que rien ne s’opposait à la tenue de ces dernières. Deux jours plus tard, la France était confinée.

Pour autant, le contexte sanitaire, dans les différentes protestations électorales n’a été évoqué qu’à la marge par les requérants et est resté sans effet sur la régularité des multiples scrutins municipaux vosgiens, qu’a eu à connaître le Cabinet.

Toute juste, en existe-t-il une mention, dans deux jugements du tribunal administratif de Nancy :

Tribunal Administratif de Nancy – 24 septembre 2020 – N°2000846

5. Les requérants soutiennent, sans l’établir, que certains électeurs ont constaté que pour certaines tranche horaires, les assesseurs étaient moralement liés par la même liste. Toutefois, la défense fait valoir, sans être contredite, que si M. X et M. Y étaient assesseurs lors de la tranche horaires de 13 heures à 15 heures 30 et qu’un troisième assesseur s’est désisté en raison de l’épidémie de Covid 19, Mme Z, l’une des requérantes, était présente et n’a signalé aucune anomalie. Par suite, les requérants ne sont pas fondés à soutenir que la composition du bureau de vote était irrégulière.

Tribunal Administratif de Nancy – 6 juillet 2020 – N°2000975

11. Toutefois, ces seules irrégularités, eu égard à l’écart de 115 voix entre les deux listes, soit près de 20% des suffrages exprimés, n’ont pas eu pour effet d’altérer la sincérité du scrutin. Si M. X soutient qu’avec douze voix supplémentaires, la liste « … » aurait obtenu un siège supplémentaire au sein du conseil communautaire, l’écart de voix s’apprécie de manière globale au regard du nombre de votes obtenus pour chaque liste et non des conséquences de ce nombre de voix sur le nombre de sièges attribués à chacune d’elle. Enfin, le contexte pandémique lié au covid-19, qui n’a pas eu d’impact différencié sur les deux listes, ne saurait en tout état de cause être une circonstance de nature à modifier l’appréciation et l’incidence de l’écart de voix sur la sincérité du scrutin.

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Si le contexte fut particulier, le contentieux demeura classique. Dans le cadre d’une protestation électorale, selon une jurisprudence constante du Conseil d’État, il n’appartient pas à la juridiction administrative de sanctionner toutes les irrégularités ayant pu entacher le déroulement d’une campagne électorale, mais seulement d’apprécier si lesdits irrégularités ont été de nature à affecter la sincérité du scrutin, et, par suite, la validité des résultats proclamés.

La communication par courrier ou au travers des réseaux sociaux, marronnier des contentieux électoraux, fut l’un des moyens principaux des différentes protestations électorales. En l’espèce, dans les deux jugements ci-après, cet argumentaire fut sans emport sur la validité du scrutin.

Tribunal Administratif de Nancy – 9 juillet 2020 – N°2000851

8. S’il résulte de l’instruction que les propos tenus sur ce groupe public ne se limitent pas à la seule critique du programme électoral de la liste « … » mais comportent effectivement des propos injurieux envers les membres de cette liste dans le but explicite de discréditer ceux-ci aux yeux de l’électorat, aucun lien n’est établi entre l’auteur de ces propos, administrateur anonyme du groupe, et la liste adverse, de sorte que ces circonstances ne peuvent être regardées comme une manœuvre de nature à altérer la sincérité du scrutin. En tout état de cause, compte tenu de l’écart de 527 voix sur les 1 077 suffrages exprimés, le protestataire ne démontre pas que la diffusion de ces propos sur le réseau social Facebook fut telle qu’elle ait eu une influence sur les résultats du scrutin.

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Tribunal Administratif de Nancy – 6 juillet 2020 – N°2000856

3. Il résulte de l’instruction qu’au mois de février 2020, M. Y [le maire en exercice] a diffusé une lettre intitulé « la vérité suite à l’ensemble des accusations dont j’ai été victime » à une quinzaine de foyer de la commune de … qui aurait été par la suite diffusée de manière plus large. Ce billet, polémique mais qui n’a pas un caractère diffamatoire, prenait appui sur les différentes instances judiciaires et notamment pénales ayant opposées M. A et M. C depuis 2015. De tels faits étaient cependant connus puisqu’ils ont donné lieu à la parution de quatre articles dans la presse régionale, le 23 septembre 2015, le 15 mars 2016, le 16 octobre 2019 et le 12 mars 2020 ainsi qu’à un reportage dans une chaine d’information régionale le 15 mars 2016. Par ailleurs, M. C a eu connaissance de l’existence de la lettre litigieuse le 6 février 2020, soit plus d’un mois avant la date du scrutin. En conséquence, les faits relatés, connus des électeurs, auraient pu donner lieu à une réponse utile avant la fin de la campagne électorale. Par suite, la diffusion de cette lettre, malgré le caractère regrettable de certains propos, n’a pas été de nature à influer sur la sincérité du scrutin.

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A côté de ce moyen, il est à noter, un moyen plus original lié à la taille non réglementaire de certains bulletins, les électeurs ayant glissé dans l’urne des documents de propagande électorale d’une taille deux fois supérieure à celle prescrite par le code électoral. Ce format n’ayant pas eu d’incidence sur le secret du vote, la sincérité du scrutin fut préservée.

Tribunal Administratif de Nancy – 24 septembre 2020 – N°2001535

3. S’il est constant que, lors du dépouillement, 21 bulletins de la liste « … » dépassaient le format prévu à l’article R.30 du code électoral, il ne résulte pas de l’instruction que ces bulletins aient été identifiables après avoir été pliés et insérés dans les enveloppes, de sorte que cette irrégularité ne peut être regardée comme ayant eu pour effet de porter atteinte au secret du vote et, par suite, à la sincérité du scrutin.

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Ainsi, le contexte particulier des élections municipales, lié à la pandémie de la Covid-19, n’a pas rejailli sur les décisions rendues par le juge administratif, en l’absence d’effet tangible sur la sincérité du scrutin.