Cour Nationale du Droit d’Asile, 30 avril 2018 – Dossier 17009555
Commentaire :
La convention de Genève du 28 juillet 1951 stipule que « le terme de réfugié s’applique à toute personne craignant avec raison d’être persécutée du fait de sa race, de sa religion, de sa nationalité, de son appartenance à un certain groupe social ou de ses opinions politiques, se trouve hors du pays dont elle a la nationalité et qui ne peut ou, du fait de cette crainte, ne veut se réclamer de la protection de ce pays ; (…) ».
La particulière vulnérabilité de l’éthnie Zaghawa au Darfour conduit la Cour à reconnaître la qualité de réfugié, à un ressortissant soudanais, sans qu’il ne soit exigé la preuve d’une persécution préalable, sous réserve qu’il établisse clairement ses origines ethniques (Zaghawa) et géographiques (Darfour).
Ce faisant, la Cour opte pour une solution, dans l’esprit de la convention précitée, qui n’évoque pas les persécutions passées mais les craintes pour l’avenir, malheureusement sérieuses, dans cet environnement explosif.
Extrait de l’arrêt :
3. Considérant qu’il résulte de l’instruction et des déclarations particulièrement précises et détaillées du requérant sur son environnement géographique, notamment sur la ville de Marla et ses alentours, qu’il est de nationalité soudanaise et originaire du Darfoud Sud ; qu’en outre, il s’est exprimé de manière tout aussi spontanée et détaillée sur l’organisation hiérarchique et les sous-clans de l’ethnie Zaghawa, permettant d’établir son appartenance à cette ethnie ; (…) qu’en outre, le rapport de l’organisation non gouvernementale Minority Rights Group International (MRGI), daté du 9 juin 2016, intitulé « Peoples under Threat 2016 », qui fait un classement des pays où certaines communautés courent le plus de risques d’être exposées à des violences de masse, génocides et répressions violentes, recense les trois ethnies Zaghawa, Four et Massalit comme étant particulièrement vulnérables au Darfour et susceptibles d’être associées aux groupes rebelle, dans la mesure où elles ont constitué les principaux foyers de recrutement au début de la guerre du Darfour en 2003 ; (…) qu’enfin, la Cour pénale internationale a délivré, le 12 juillet 2012, un second mandat d’arrêt contre Omar El Bechir, considérant qu’il y a des motifs raisonnables de croire en sa responsabilité pénale pour des actes de génocide visant les trois groupes ethniques précités, justifiant ainsi la réalité des craintes en cas de retour les ressortissants soudanais de ces ethnies ; que, dans ces conditions, Monsieur X craint avec raison, au sens des stipulations précitées de la convention de Genève, d’être persécuté, en cas de retour dans son pays, par les autorités en raison de son origine ethnique et des opinions politiques qui lui sont imputées de ce fait ; que, dès lors, il est fondé à se prévaloir de la qualité de réfugié ;