Autorisation CNAC : une décision de justice en faveur d’un projet de drive

CAA Nancy, 22 mai 2025, n°22NC01434

Quand l’urbanisme commercial fait débat

Dans une affaire jugée par la cour administrative d’appel de Nancy le 22 mai 2025, un projet d’aménagement commercial dans les Vosges a suscité une vive opposition de la part d’un acteur local du commerce de détail. Le projet visait à transformer un ancien site commercial en un drive alimentaire moderne de 10 pistes, assorti d’un bureau pour la location de véhicules.

Un permis de construire avait été accordé par la mairie fin 2021. Mais une autre enseigne de grande distribution, déjà implantée sur la commune, a contesté cette autorisation devant la justice, estimant que le projet allait à l’encontre des règles d’aménagement du territoire et de développement durable.

Des arguments nombreux, mais non retenus

La société opposante soulevait plusieurs points pour tenter de faire annuler l’autorisation :

  • Un vice de procédure : elle affirmait que la commission nationale chargée d’examiner le projet n’aurait pas respecté les délais et modalités de convocation.
  • Un dossier incomplet : selon elle, le projet ne comportait pas d’étude suffisante sur les impacts du trafic routier ni sur les alternatives d’implantation sur d’autres friches disponibles.
  • Un impact négatif sur le centre-ville : le nouveau drive risquerait, selon l’entreprise, de détourner encore davantage les clients des commerces de proximité, affaiblissant ainsi la vie commerciale urbaine.

Ce qu’a retenu la cour

Après un examen détaillé, la cour a rejeté l’ensemble de ces arguments. Voici pourquoi :

  • La procédure a été jugée régulière : les membres de la commission ont bien reçu tous les documents dans les délais prévus, par des outils numériques prévus à cet effet.
  • L’étude d’impact sur le trafic a été jugée suffisante : le futur drive devait générer environ 47 véhicules par jour supplémentaires, bien en deçà de la capacité des infrastructures routières locales.
  • Le choix du site est cohérent : le projet s’implante sur une friche commerciale déjà existante, évitant ainsi la consommation excessive d’espace. Le site est bien desservi par les transports et conçu avec des solutions écologiques (revêtements perméables, panneaux solaires, gestion durable des eaux pluviales…).
  • L’effet sur le centre-ville est limité : les juges ont estimé que le type de consommation associé au drive (achats mensuels ou bimensuels en voiture) était différent de celui des commerces de centre-ville (achats plus fréquents et variés), et donc peu concurrent.

Une décision aux effets concrets

La cour a donc validé le permis de construire. De plus, elle a condamné la société contestataire à verser une indemnité à la fois au porteur du projet et à la commune pour couvrir leurs frais de justice.

Ce qu’il faut en retenir

Cette affaire illustre plusieurs enseignements importants :

  • Les projets commerciaux doivent être bien documentés et s’inscrire dans les politiques publiques locales (revalorisation des friches, développement durable, etc.).
  • Contester un permis exige des arguments solides : une simple rivalité commerciale ne suffit pas.
  • La justice administrative prend en compte l’ensemble des impacts : urbains, environnementaux, économiques.

Dans un contexte où l’équilibre entre grandes surfaces, commerces de centre-ville et développement durable est au cœur des préoccupations, cette décision rappelle que l’urbanisme commercial est un domaine très encadré, où chaque projet est jugé sur sa capacité à s’insérer intelligemment dans son territoire.