Cour d’Appel de Nancy – 19 janvier 2021 – N°19/01030
Commentaire :
Depuis plusieurs années, partout en France, un contentieux oppose les Établissements Publics Fonciers (EPF) à la Caisse Nationale déléguée pour la sécurité sociale des travailleurs indépendants venant aux droits de la caisse nationale du Régime Sociale des Indépendants (RSI).
Selon la caisse, ces EPF sont assujettis à la Contribution Sociale de Solidarité des Sociétés (C3S) en application de l’article L. 651-1, 4° du code de la sécurité sociale, dans sa rédaction modifiée par la loi n°2007-1786 du 19 décembre 2007 (applicable à l’espèce traitée par le Cabinet), qui dispose que les personnes morales de droit public y sont assujetties dans les limites de leur activité concurrentielle.
Faute de détermination de la notion d’activité concurrentielle par le texte précité, la Caisse soutenait que l’assujettissement à la TVA déterminait le caractère concurrentiel de l’activité.
Le cabinet, défendant les intérêts d’un EPF, contraint d’interjeter appel après sa condamnation par le pôle social du tribunal judiciaire de NANCY, soutenait, entre autres moyens, que la TVA ne pouvait constituer le critère déterminant l’activité concurrentielle au motif notamment que le texte applicable ne faisait plus référence à l’article 256 B du code général des impôts (assujettissement des personnes morales de droit public à la TVA).
La Cour, faisant droit aux moyens du cabinet, prend le soin de préciser qu’il n’est pas permis de regarder les EPF comme exerçant une activité concurrentielle par nature en raison du caractère très contraint de leurs champs d’intervention ainsi que de la jouissance de prérogatives de puissance publique.
Extrait de l’arrêt :
Il convient de préciser que si le texte précité n’a pas défini l’activité concurrentielle qu’il énonce, celle-ci ne saurait se rapporter à l’assujettissement à la TVA comme le soutient l’URSSAF dans la mesure où précisément ce texte dans sa rédaction applicable au litige ne fait plus référence aux règles d’assujettissement de l’article 256B du code général des impôts. Par ailleurs si l‘assiette de la C3S est celle du chiffre d’affaires global déclaré à l’administration fiscale (Soc. 29 juin 1995, no92-22.025, Bull civ. V, no228), il reste qu’il ne saurait être tenu compte de son traitement fiscal ( Civ 2ème, 23 avril 2003, no01-21.443), et la C3S du fait de son affectation exclusive au financement de la sécurité sociale présente la nature d’une cotisation distincte de la TVA dont l’assujettissement à cette contribution est exclusivement défini par les dispositions des articles L. 615-1 et L. 651-2 du code de la sécurité sociale. Il s’ensuit que le seul critère d’assujettissement d’un établissement public foncier à la C3S est celui d’une activité concurrentielle (rappr. 2e Civ., 3 novembre 2016, pourvoi n° 15-25.805). Il convient d’ajouter qu’il ne saurait être considéré qu’un établissement public foncier exerce par nature une activité concurrentielle, au moins pour une part, alors que celle-ci doit être caractérisée au regard de l’activité effective de cet établissement.
Me Yanis ZOUBEIDI-DEFERT – 19 janvier 2021